Les comportements autistiques

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Des comportements pour mieux fonctionner

Par Rachel Ouellet


Les comportements autistiques attirent souvent notre attention dès le jeune âge, juste parce qu’ils sont particuliers et directement associés à l’autisme. Pour la plupart, ils s’observent lorsque la personne se sent bien ou lorsqu’elle tente de se réguler. C’est-à-dire, de faire des comportements ou actions afin de pouvoir continuer à fonctionner et pour répondre à ce qui est présenté par l’environnement. Généralement, je propose de les ignorer, dans le sens de les laisser s’exprimer, tout simplement. J’aime mieux laisser un petit coco prendre une minute pour sautiller sur place avant de revenir à l’activité en cours que de l’obliger à rester assis et voir apparaître des signes de non-disponibilité.

Ces comportements peuvent aussi aider la personne à traiter l’information et à assimiler ce qu’elle vit, particulièrement chez les personnes autistes de plus bas fonctionnement ou encore très jeunes. Les empêcher reviendrait donc à court-circuiter ce traitement cognitif. Le fait de bouger les aide à poursuivre la tâche qu’ils ont à faire et favorise l’attention lorsque celle-ci diminue.


Découvrir par la bouche

Les personnes autistes en bas âge ont tendance à porter des objets non adéquats à leur bouche, un peu comme un bébé qui mâchouille tout ce qui est à sa portée. L’information sensorielle est très importante pour elles, et la bouche est une partie très sensible. Parfois, l’objet ne va pas dans leur bouche, mais plutôt sur leurs lèvres. Plusieurs personnes donnent de petits coups de langue, juste pour voir. Souvent, ceux qui ont la bouche hypersensible ont ce genre de comportement. Ils acceptent peu d’aliments, malheureusement, mais lécher le crayon leur semble bien intéressant!

L’autiste mâchouille aussi des objets lorsqu’il est en surcharge ou anxieux. Bien des chandails ont été ravagés en une seule journée difficile! Les crayons sont aussi victimes de ce sort. Par chance, les mâchouilles arrivent à notre rescousse! Il y en a de toutes sortes aujourd’hui. Certains donnent même l’impression d’être des bijoux comme des colliers ou des bracelets. J’aime bien les colliers, car ils ne traînent pas partout et sont donc plus hygiéniques. Il est aussi plus rare de les oublier, car ils sont presque toujours au cou de l’enfant, prêts en cas de besoin!



Lorsque l’enfant met dans sa bouche des objets non adéquats, je recommande de traiter ce problème comme on le ferait avec un tout-petit : tout ce qui est dangereux est gardé hors de sa portée, sous clé si vous le jugez nécessaire. Pour le reste, si ça ne change pas grand-chose, vous pouvez laisser tomber. Car tenter de faire comprendre à un jeune enfant autiste ou avec une déficience intellectuelle que c’est sale donnera peu de résultats. On lui fournit plutôt une belle mâchouille!


Observer différemment

Ce qui attire aussi notre attention chez l’enfant en bas âge est la façon dont il observe les choses. Il aime les objets qui tournent ou font de la lumière. Il regarde le ventilateur, par exemple, avec beaucoup d’intérêt. Les roues des petites voitures sont très aimées de lui. On voit régulièrement des enfants qui se couchent au sol pour avoir un point de vue différent. Et même qui se tiennent la tête en bas!

C’est souvent ce qu’ils regardent qui nous met la puce à l’oreille : par exemple, l’enfant veut absolument aller en dessous de la table pour voir à quoi elle ressemble sous cet angle. En fait, cela pose uniquement problème à la personne typique. Nous avons tendance à vouloir amener l’enfant autiste à regarder les choses comme nous. Nous avons alors le réflexe de l’empêcher d’aller sous la table. Ou de tenter d’attirer son attention sur un livre plutôt que sur le ventilateur qui fonctionne.

Il est effectivement important d’inviter l’enfant à observer toutes sortes de choses. Mais sa façon de faire nous renseigne sur ses centres d’intérêt actuels. Elle nous indique où il est rendu dans son développement autistique et ce qui pique sa curiosité. Je crois profondément que la curiosité est le plus beau signe d’intelligence qui soit. Est-ce vraiment important que l’enfant fasse ses apprentissages assis à la table? Et si de faire tomber des objets lui permet de comprendre comment ils réagissent? Et d’ainsi mieux comprendre le monde dans lequel il vit? Notre rôle est de lui fournir des objets intéressants pour cette expérience autistique. Lorsque la curiosité est présente, un enfant bien guidé apprend souvent plus de choses qu’on ne le pense!


Tourner, sautiller et se balancer

Tourner sur soi-même est un comportement régulièrement observé chez l’enfant autiste. Il le fait souvent debout, mais plusieurs aiment utiliser la balançoire. Vous savez, il en entortille les cordes pour ensuite se laisser aller! Normalement, cette action répond à un besoin de régulation et elle lui fait du bien. Temple Grandin (une femme autiste bien connue) en est une grande adepte!

J’ai déjà suivi un client qui était capable de tourner sur lui-même pendant une vingtaine de minutes sans s’arrêter. Il le faisait régulièrement en revenant de l’école. Il tournait et tournait, tout en nommant en boucle des choses qui s’étaient passées durant cette journée-là, des choses qui semblaient avoir été difficiles ou incompréhensibles pour lui. Il pouvait répéter une trentaine de fois par exemple : Non, non… Il ne faut pas taper! Par la suite, il semblait beaucoup plus calme et passait à autre chose. Il faut dire toutefois, que j’étais étourdie pour lui, juste à le regarder!

Sauter sur place semble plutôt correspondre à une recherche sensorielle pour les hyporéactifs. Peut-être cela réveille-t-il leur corps? Peu importe pourquoi elle s’y adonne, la personne autiste semble la plupart du temps heureuse lorsqu’elle a ce comportement. Si elle est contente et que ça lui fait du bien, je ne vois pas pourquoi je l’en empêcherais. Le trampoline est un outil qui répond bien à ce besoin.



Le balancement d’avant en arrière est aussi répandu. Il répond aux mêmes besoins que les comportements précédents : se réguler, s’apaiser et faciliter le traitement de l’information. Je l’observe régulièrement lorsque la personne est assise, mais aussi debout. Le balancement, qu’on appelle parfois rocking, peut être léger ou très intense. Il est préférable de donner un minimum d’espace à la personne pour qu’elle le fasse sans déranger. Si c’est discret, toutefois, je ne m’en occupe pas. Ça semble relaxant de se balancer doucement en faisant un casse-tête, par exemple. Si les mouvements n’empêchent pas l’activité en cours, il ne sert à rien de tenter de les contrôler.

Les balançoires suspendues intérieures peuvent être vraiment intéressantes. J’aime aussi proposer les chaises berçantes, les hamacs ou les balançoires en tissu, qui procurent le sentiment d’être dans un cocon. On peut même s’y coucher complètement si on veut. Avec un balancement tout doux, le retour au calme est assuré.



Des comportements qui dérangent… vraiment?

Lorsqu’on fait des recherches sur les comportements autistiques comme ceux décrits ici, on tombe régulièrement sur des explications qui, je dois l’avouer, me dérangent un peu. On parle de comportements restreints, répétitifs, stéréotypés… Ces mots ont une connotation plutôt négative. Je trouve particulier qu’on qualifie autant ces comportements de régulation autistique, alors qu’on qualifie peu ceux de la personne typique. On ne passe pas des heures à discuter du fait qu’un enfant se ronge les ongles, gigote sur sa chaise ou va demander un câlin à sa mère lorsqu’il est anxieux. On doit redonner à l’autisme ce qui lui appartient, tout simplement. Les comportements autistiques ont pour but de répondre à des besoins fondamentaux : s’amuser, se sécuriser, se calmer, rire, rester disponible ou même s’aider à réfléchir. Ils sont normaux et bénéfiques pour les personnes autistes, bien que différents de ce à quoi nous sommes habitués, comme personnes typiques.

Je crois qu’ils dérangent surtout parce qu’ils créent des malaises. Ne sachant pas vraiment comme les analyser ou les comprendre, nous les voyons comme inadaptés. Justement, il faut les regarder différemment! Demandez-vous si la personne autiste semble avoir du plaisir. Si ça lui fait du bien. Est-ce que c’est vraiment ses agissements qui sont problématiques ou si c’est plutôt le malaise créé qui dérange? Prenez du recul pour réfléchir à ces questions.


Pour ma part, si la personne autiste est heureuse, eh bien je le suis, moi aussi!


Pour mieux comprendre le monde autistique, pour avoir une panoplie de trucs et d’outils pour votre quotidien et faire grandir le beau potentiel de ces enfants merveilleux, je vous propose mon livre Autisme, de la collection La Boîte à outils des éditions de Mortagne.

Bon voyage TSA!